Racisme à l’Ecole : comprendre pour agir

Job d’étudiant.e

Alors que les chiffres attestent de l’ampleur des discriminations structurelles que subissent les personnes Afro-descendantes et racisées, ces dernières se voient souvent opposer le déni lorsqu’elles prennent la parole pour dénoncer ces constats.

Rappel des balises à avoir en tête : 1/ ne jamais déconnecter le racisme de l’histoire qui l’a vu émerger, évoluer et s’adapter, 2/ l’école n’est pas une bulle située en dehors de la société, il importe donc de prendre en compte le contexte social pour analyser ce qui se passe à l’école, 3/ dans cette situation, il faut constamment se demander qui parle, de qui et depuis quelle position, et enfin 4/ il est essentiel de garder en tête les impacts du racisme sur les vécus, émotions et ressentis individuels.

Alors que les chiffres attestent de l’ampleur des discriminations structurelles que subissent les personnes Afro-descendantes et racisées, ces dernières se voient souvent opposer le déni lorsqu’elles prennent la parole pour dénoncer ces constats.

Rappel des balises à avoir en tête : 1/ ne jamais déconnecter le racisme de l’histoire qui l’a vu émerger, évoluer et s’adapter, 2/ l’école n’est pas une bulle située en dehors de la société, il importe donc de prendre en compte le contexte social pour analyser ce qui se passe à l’école, 3/ dans cette situation, il faut constamment se demander qui parle, de qui et depuis quelle position, et enfin 4/ il est essentiel de garder en tête les impacts du racisme sur les vécus, émotions et ressentis individuels.

Situation

Dans une classe de rhétorique, une élève Afro-descendante se plaint de ne jamais être embauchée pour des jobs d’étudiante alors que ses copines blanches sont sélectionnées sans rencontrer les mêmes problèmes. Elle ajoute que ses copines ne présentent pourtant pas de qualités supplémentaires sur leur CV. Dans la discussion, un autre élève – blanc – intervient et lui rétorque qu’elle n’a aucune preuve pour avancer ses propos. Selon lui, les autres copines présentent sans doute des qualités recherchées qui n’ont rien avoir avec sa couleur de peau. Finalement, la situation devient pesante, le professeur, qui n’est pas intervenu dans ce débat, décide de changer de sujet.

Analyse de la situation

Face aux déclarations de la jeune fille, le premier réflexe de son camarade de classe est de nier son expérience et de trouver une autre explication au constat de discrimination avancé. Ce réflexe de déni est extrêmement fréquent lorsqu’une personne racisée dénonce une situation de racisme qui non seulement la désavantage mais aussi, et surtout, rend visibles les avantages et privilèges que les personnes blanches retirent de la blanchité.

En Belgique, les chiffres attestent de l’immense ampleur des discriminations subies par les personnes Afro-descendantes. Ainsi, bien que plus diplômé.e.s en moyenne que le reste de la population, les personnes Afro-descendantes originaires du Congo, du Rwanda ou du Burundi sont quatre fois plus au chômage, et ce taux reste trois fois plus élevé pour les personnes de seconde génération, nées et ayant grandi en Belgique. En outre, en termes de ressenti, 80% des personnes d’origine burundaise, congolaise et rwandaise sondées estiment ne pas avoir les mêmes chances que la population non issue de l’immigration dans les domaines du logement et de l’emploi. Voici quelques chiffres parmi beaucoup d’autres qui démontrent l’ampleur des discriminations subies.

Ainsi, le témoignage de cette jeune fille résonne non seulement dans un contexte où les discriminations structurelles sont extrêmement marquées, mais fait également écho à une expérience ressentie par une grande majorité de personnes Afro-descendantes.

Dans ce type de situation, il est souvent demandé à la personne qui dénonce le racisme de prouver ses dires : « Comment peux-tu être certaine qu’il s’agit de racisme ? ». Ce type de question illustre toute la méconnaissance en ce qui concerne le racisme, ce dernier étant dans l’imaginaire majoritairement réduit aux actes et discours de haine visibles et évidents. Or, le racisme se matérialise tout autant de manière insidieuse, via des attitudes, des pratiques ou des émotions qui peuvent a priori paraitre neutres mais qui contribuent à produire et justifier des différences de traitement ou des micro-agressions. Mais ces dernières ne sont pas directement visibles pour les personnes blanches qui ne les subissent pas. Le camarade de classe qui réagit n’a clairement pas conscience de la position qu’il occupe dans l’échelle sociale et la manière dont cette position influence sa perception. En tant que personne blanche, il ne subit pas les discriminations ou violences racistes. Il ne doit pas non plus supporter la charge raciale que le racisme fait subir aux personnes racisées.

Le déni pour maintenir l’ignorance

Les réactions de déni constituent un réflexe défensif très fréquent lorsque les avantages pour le groupe dominant sont visibilisés. Dans cette situation, la jeune fille ne se contente pas de constater les difficultés qu’elle vit pour trouver un job d’étudiante, elle pose ce constat en comparaison avec ses copines blanches. Ce faisant, elle nomme ce qui, habituellement ne l’est pas : la blanchité. Et dans ce genre de cas, cela débouche presque systématiquement sur des attitudes de résistance, de déni, de défense. Ces réflexes portent un nom : la fragilité blanche. Il s’agit d’un ensemble d’émotions très fortes et de réactions que les personnes blanches vont avoir tendance à ressentir et avoir lorsqu’elles sont positionnées dans le système raciste. Ces réactions et arguments ont une fonction sociale et des effets puissants : rétablir une vision plus confortable du racisme, une vision morale, binaire, dans laquelle elles ne sont pas confrontées à leur position et à leur rôle au sein du système raciste.

En outre, dans cette situation, le professeur n’intervient pas. Ce faisant, il cautionne ce qui est dit. Et finalement, lorsque l’atmosphère devient pesante, il décide de changer de sujet. Il importe ici de se questionner : pour qui est-ce nécessaire de changer de sujet ?

Cette fragilité blanche et les différentes stratégies qu’elle implique ont des conséquences importantes : non seulement cela ne permet aucun débat de fond sur le problème soulevé, mais en outre cela constitue une double violence dans la mesure où les personnes concernées voient leur parole décrédibilisée.

MPEG4 - 8.5 Mio Extrait d’une conférence donnée par Hassina Semah, la conférence est disponible ici https://www.facebook.com/229203850426658/videos/375042766970441