
Rôle au théâtre
Résumé : Les mondes de la culture, de l’art ou du théâtre sont traversés par le racisme et les discriminations. L’invisibilisation des personnes noires dans ces secteurs est flagrante et l’attribution de « rôles de Noir
e s » à des personnes Afro-descendantes reste monnaie courante.Rappel des balises à avoir en tête : 1/ ne jamais déconnecter le racisme de l’histoire qui l’a vu émerger, évoluer et s’adapter, 2/ l’école n’est pas une bulle située en dehors de la société, il importe donc de prendre en compte le contexte social pour analyser ce qui se passe à l’école, 3/ dans cette situation, il faut constamment se demander qui parle, de qui et depuis quelle position, et enfin 4/ il est essentiel de garder en tête les impacts du racisme sur les vécus, émotions et ressentis individuels.
Résumé : Les mondes de la culture, de l’art ou du théâtre sont traversés par le racisme et les discriminations. L’invisibilisation des personnes noires dans ces secteurs est flagrante et l’attribution de « rôles de Noir
e s » à des personnes Afro-descendantes reste monnaie courante.Rappel des balises à avoir en tête : 1/ ne jamais déconnecter le racisme de l’histoire qui l’a vu émerger, évoluer et s’adapter, 2/ l’école n’est pas une bulle située en dehors de la société, il importe donc de prendre en compte le contexte social pour analyser ce qui se passe à l’école, 3/ dans cette situation, il faut constamment se demander qui parle, de qui et depuis quelle position, et enfin 4/ il est essentiel de garder en tête les impacts du racisme sur les vécus, émotions et ressentis individuels.
Situation
Dans une classe de cinquième secondaire, il est temps de préparer la pièce de théâtre du semestre : Roméo et Juliette. La professeure demande qui dans la classe aimerait jouer le rôle de Roméo. Gabriel, élève noir, lève la main, au même titre que deux autres élèves blancs. La professeure choisit de confier le rôle à Jérôme, en expliquant à Gabriel qu’elle est désolée mais que Roméo est Italien. Et elle ajoute : « pour le second semestre, nous choisirons une pièce dans laquelle tu pourras jouer le premier rôle ».
Analyse de la situation
Gabriel ne peut donc pas jouer le rôle de Roméo car ce dernier est italien. En réalité, ce que la professeure a voulu dire, c’est que Roméo est blanc. Ce faisant, elle renvoie directement Gabriel à sa couleur de peau, à la différence, à l’altérité, à l’étranger. A-t-elle conscience de la violence que cela implique pour le jeune garçon ?
Cette situation résonne fortement dans un contexte présent où de nombreuses polémiques surviennent sur le racisme dans le monde de la culture, du cinéma ou du théâtre. Ainsi, l’ouvrage collectif « Noir n’est pas mon métier » recense les témoignages de nombreuses actrices noires et métisses sur les violences et discriminations racistes dans les mondes culturel et artistique français. Par exemple, le fait d’être cantonnées aux seuls rôles stéréotypés de techniciennes de surface. En 2016, le Hashtag #OscarsSoWhite dénonçait quant à lui la blanchité dans le monde du cinéma et l’absence de reconnaissance des acteurs et actrices afro-descendant.e.s dans ce milieu.
Nous n’entrerons pas ici dans les discussions sur le fait de savoir si certains corps doivent ou non jouer certains rôles historiques au cinéma ou au théâtre (bien que nous ayons un avis à ce sujet). Dans ce cas-ci, il importe plutôt d’insister sur deux éléments :
- D’une part, en dépit des discours majoritaires au sein du corps enseignant sur le fait qu’on ne voit pas les couleurs et que chaque enfant est perçu de la même façon, force est de constater que ce n’est pas si évident. Les enseignant.es, à l’instar de toute personne socialisée dans une société structurellement marquée par le racisme, voit son regard sur le monde impacté par la race. Et certains corps sont l’objet de certains regards, de certains imaginaires. En l’occurrence, dans cette situation, Gabriel cesse d’être un individu unique : à cet instant précis, il est avant tout noir. Or, comme ce fut le cas historiquement et comme cela continue d’être le cas de manière structurelle aujourd’hui, cette assignation enfermante non seulement lui ferme des portes mais constitue une violence symbolique énorme (trauma racial).
- D’autre part, dans une société structurée autour de la blanchité, cette dernière est la norme à partir de laquelle est pensée l’altérité. Or, la norme n’est pas nommée, n’est pas pensée comme telle. Concrètement, cela signifie que si nous n’y faisons pas attention, les pratiques et choix que nous posons à l’école comme ailleurs seront pensés pour les élèves blancs. Cela concerne aussi bien les pièces de théâtre que les livres à lire en cours de français, les thématiques des fêtes de fin d’année ou encore les documentaires dans les cours d’histoire.
Au vu de l’histoire et du contexte actuel, on comprend que refuser à un
e élève un rôle « parce qu’il ou elle est Noir e », peut se vivre de manière très violente pour l’élève et peut entrainer des réactions émotionnelles très fortes. Ces réactions restent parfois incomprises des personnes blanches, vivant dans une société dont la culture, les médias, le cinéma, sont structurés autour de la blanchité et qui n’ont pas l’habitude d’être relégué e s sans cesse à la marge.A partir de 32:58