Racisme à l’Ecole : comprendre pour agir

Une prof de musique

Le racisme se manifeste le plus souvent dans des attitudes et réactions insidieuses, peu visibles, voire inconscientes. Qui plus est, lorsqu’une personne qui subit le racisme prend la parole pour le dénoncer, les réactions de déni ou de relativisme constituent une double violence.

Rappel des balises à avoir en tête : 1/ ne jamais déconnecter le racisme de l’histoire qui l’a vu émerger, évoluer et s’adapter, 2/ l’école n’est pas une bulle située en dehors de la société, il importe donc de prendre en compte le contexte social pour analyser ce qui se passe à l’école, 3/ dans cette situation, il faut constamment se demander qui parle, de qui et depuis quelle position, et enfin 4/ il est essentiel de garder en tête les impacts du racisme sur les vécus, émotions et ressentis individuels.

Le racisme se manifeste le plus souvent dans des attitudes et réactions insidieuses, peu visibles, voire inconscientes. Qui plus est, lorsqu’une personne qui subit le racisme prend la parole pour le dénoncer, les réactions de déni ou de relativisme constituent une double violence.

Rappel des balises à avoir en tête : 1/ ne jamais déconnecter le racisme de l’histoire qui l’a vu émerger, évoluer et s’adapter, 2/ l’école n’est pas une bulle située en dehors de la société, il importe donc de prendre en compte le contexte social pour analyser ce qui se passe à l’école, 3/ dans cette situation, il faut constamment se demander qui parle, de qui et depuis quelle position, et enfin 4/ il est essentiel de garder en tête les impacts du racisme sur les vécus, émotions et ressentis individuels.

Situation

Une enseignante afro-descendante remarque que quelques élèves ont des comportements inadéquats les unes envers les autres dans la cour de récréation. Elle entend notamment des propos racistes dans la bouche de certains enfants. Elle tente d’en parler avec la direction, mais elle a réellement le sentiment de ne jamais être entendue ni prise au sérieux. Elle en parle à ses collègues et explique avoir le sentiment que c’est souvent le cas. Elle se demande de plus en plus si ce manque de considération n’a pas trait à sa couleur de peau. Ses collègues blancs lui rétorquent spontanément : « Maaaais non, ça n’a rien à voir avec ta couleur de peau, c’est juste que tu es une professeure d’art plastique, et généralement, ces professeurs-là sont moins écoutés ».

Analyse de la situation

Déjà durant l’époque coloniale, l’idée que les Blancs avaient accès à la vérité et étaient détenteurs de l’objectivité était largement partagée. Les Blancs n’étaient-ils pas supposés apporter la lumière et la connaissance à des populations jugées inférieures, incapables ? Ces imaginaires racistes n’ont pas disparu avec la fin de la colonisation. Aujourd’hui encore, la parole des personnes blanches est généralement jugée plus rationnelle, plus objective et plus crédible aux oreilles de l’opinion publique que celle de personnes Afro-descendantes. Ces dernières sont donc le plus souvent appelées à livrer leur témoignage sur ce qu’elles vivent, tandis que l’expertise – valorisée à la fois matériellement et en termes de reconnaissance sociale – prend généralement la couleur du blanc.

Dans l’émission « Les Décodeurs », Betel Mabille, militante afro-féministe et antiraciste, aborde la question de la prise de parole des personnes non-blanches dans les médias. Elle insiste sur le fait que les personnes non-blanches sont principalement appelées pour parler de leur vécu, et non de leur expertise en termes de racisme. Elle déplore également que les personnes Afro-descendantes ne soient jamais appelées pour parler de sujets de société plus généraux.

Un déni très ancré

Lorsqu’une personne racisée soulève ces constats, le déni est généralement spontané chez les personnes blanches. Ainsi, pour les collègues de cette professeure, il est impossible d’admettre que la couleur de peau puisse expliquer en partie l’attitude de la Direction à son égard. Le réflexe premier est plutôt d’avancer une autre explication. Il y a généralement une présomption quasi-systématique que le problème n’est pas lié au racisme. Cette présomption repose sur la vision colorblind selon laquelle aujourd’hui, nous serions toutes et tous égaux.ales et qu’à moins d’être « clairement raciste », jamais la couleur de peau n’aurait d’impact sur notre manière d’interagir socialement.

Or, nous l’avons vu, il n’y a pas eu rupture mais bien continuité avec la période coloniale et la race continue d’impacter les regards, les subjectivités, les manières de se penser soi et de penser le monde.

Dans ce cas-ci, la réaction des collègues de la professeure est renforcée par le fait que cette dernière met en lumière la blanchité et les privilèges blancs. En expliquant que sa couleur de peau impacte la manière dont ses propos sont reçus, elle met en lumière une dimension relationnelle : si elle est moins entendue, moins prise au sérieux, c’est par rapport à quelqu’un d’autre, c’est par rapport aux personnes blanches. Or, les personnes blanches ne sont pas habituées à être nommées comme telles. Ce faisant, elle brise la vision morale et colorblind du racisme et instaure un inconfort pour ses collègues blancs en les poussant à devoir, eux aussi, se situer dans le système raciste. Or, il est difficile pour des personnes progressistes d’accepter qu’elles bénéficient de quelque chose d’aussi moralement condamnable que le racisme. Il faut donc trouver une autre explication pour retrouver une situation acceptable. C’est ce que l’on appelle la fragilité blanche.